mué en fourme d’ours,
et faisoit la sa penitance, si comme
Acteon fu mué en cerf." "
Acteon," respondi l’escuier, "doulx maistres, or m’en comptéz le
compte, et je vous em pry?" "Volentiers", di ge; "selonc les anciennes
escriptures nous trouvons escript que
Acteon fut ung frisque et gentil chevalier,
et amoit le deduit des chiens sur toutes riens, dont il advint une fois que il chaçoit ens es bois de
Thesalle et esleva ung cerf merveilleux, grant et bel, et le chaça tout le jour, et
le perdirent toutes ses gens et ses levriers aussi. Luy, qui estoit fort ententif a poursieuvir sa proie,
sieuvy la trace du cerf, tant que il vint en une prairie ou bois enclose et environnee de haulx
arbres, et la en celle prairie avoit une tres belle fontaine; en celle fontaine pour li rafreschir se
baignoit Dyane, la deesse de chasteté, et autour de lui estoient ses pucelles. Le chevalier s’embati sur elles, ne oncques ne s’en donna
garde, si fut venu
si avant que il ne pouoit reculer. Elles, qui furent honteuses de sa venue, acoururent vers leur
damme, qui fut vergongneuse de ce que elle estoit nue, mais pardessus toutes ses pucelles
elle s’aparut et vey le chevalier; si dist: "
Acteon, qui cy t’envoia,
il ne t’ama guaires. Je ne vueil pas, quant tu seras
ailleurs que cy, que tu te
vantes que tu m’aies veüe nue ne mes pucelles, et pour l’outraige que tu as fait, il t’en fault avoir
la penitance. Je vueil que tu soies tel et en la forme que le cerf, que tu as huy chacié, est."
Tantost
Acteon fut mué en cerf et courut aval la forest comme ung autre, et
encores par samblable cas le cerf de sa nature aime les chiens. Ainsi peut il avenir de l’ours dont
vous m’avéz fait vostre compte, et que la dame y scet autre chose ou sçavoit, que elle
desist pour l’eure." "Si la doit on tenir pour excusee", respondi l’escuier. "Il
puet estre." Ainsi finames nous nostre compte.
SHF 3-23 sync
Entre les solempnitéz que le conte de
Foeis fait des haulz jours solempnéz de l’an, il fait trop durement grant compte et grant feste
ou qu’il soit. Ce me dist ung escuier de son hostel, le tiers jour que je fus venu a
Ortais, de la nuit Saint Nicholas en yver, et en fait faire
solempnitéz par toutes ses terres aussi haultes, aussi grandes et plus que le jour de la
Pasque, et j’en vey bien l’apparant, car je fus la en tel jour. Tout le
clergié de la ville
d’Ortais et toutes les gens, hommes, femmes et enfans en pourcession l’alerent querre au chastel, lequel tout de pié avecques le clergié et les proces
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